Cap’Com 2011 : débriefing des carrefours numériques, épisode 2
Le départ du carrefour a été très « violent », Laurent Riera – directeur de la communication d’Evry-Centre-Essonne – a rappelé quelques réalités qui font mal, notamment sur les faibles statistiques de lecture des articles et des vidéos sur les sites web de collectivités. Ce constat est d’autant plus navrant que les moyens mis en œuvre pour la production de ces contenus sont parfois très conséquents.
Face à l’infobésité du web, il est judicieux de se recentrer sur ses compétences et de ne pas déployer des moyens disproportionnés au regard de l’audience des sites web de collectivité.
On peut donc se demander quel est l’intérêt de produire des informations qui ne sont pas lues. Effectivement, il semble que les actualités ne fassent pas parti des attentes prédominantes des internautes des collectivités.
Pourquoi l’internaute ne vient pas sur un site web de collectivité pour lire les actualités ?
A votre avis, pourquoi les internautes viennent sur un site web de collectivité ? C’est la question que s’est posé Hervé Pargue dans un article intitulé « Les trois postures d’un internaute sur un site de collectivité locale ».
Voici ces 3 postures :
L’internaute usager, qui vient consulter des services en ligne et l’information pratique. L’internaute citoyen, qui vient se renseigner sur les décisions politiques, délibérations et autres…
L’internaute consommateur, celui qui vient chercher des informations culturelles, qui consulte les actualités, etc…
Dans la majorité des cas, on peut supposer que les internautes sont dans une posture d’usager, potentiellement de citoyen, rarement de consommateur : la PQR et les sites web de tourismes prennent souvent le dessus.
Cependant, cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas publier d’actualités, c’est même essentiel : l’une des missions de la communication publique est d’informer. Même si les actualités sont peu consultées, le devoir du communicant public est d’informer les citoyens/usagers sur le fonctionnement de chaque service, ce qu’il fait, les événements à venir, indépendamment de statistiques de lecture.
Comment intéresser l’internaute ?
Le site web d’une collectivité est avant tout un système d’information, à éditorialiser, à penser globalement. Ce système ne doit pas être fermé. On doit ouvrir la boite : penser uniquement « site web » c’est s’enfermer : c’est ce que nous dit Xavier Crouan, directeur général adjoint des services chargé de l’Unité Communication de la Région Île-de-France, lors de son intervention.
La Région comme « l’AFP des autres collectivités ».
Xavier Crouan nous raconte une initiative très intéressante : comme l’AFP, la collectivité fournit du contenu libre de modifications aux autres collectivités environnantes qui peuvent le réexploiter. On est dans du « partenariat éditorial ». Comme l’AFP qui diffuse des dépêches aux journalistes. Les collectivités se distribuent des contenus modifiables et adaptables entre elles.
Prendre le temps de faire des choses biens, belles, qualitatives et répondant à des besoins.
La dernière personne à intervenir : Laure Chatel – responsable technologies numériques et digitales de la ville de Nantes- a été chargée de la refonte de la stratégie de présence en ligne de la ville de Nantes. Cette intervention m’a marqué car il me semble qu’elle et son équipe ont pris le temps de d’approfondir leur stratégie durant une année avant de réaliser leur nouvelle stratégie de communication en ligne.
Je suis partisan de savoir prendre son temps, afin d’avoir un recul par rapport aux critères strictement quantitatifs et s’orienter au maximum vers du qualitatif. Certes, j’enfonce des portes ouvertes. Le but de la démarche est de prendre le temps nécessaire afin de connaître précisément tous les paramètres et ainsi de pouvoir ajuster au maximum sa communication en amont du lancement d’une stratégie de communication. J’espère ne pas être le seul à penser qu’énormément de choses se font à moitié de nos jours, y compris chez ceux qui prétendent faire des choses extraordinaires.
Bref, on ressent dans son discours la volonté de mener une vraie conduite de changement web plus qu’une « simple » stratégie, autant en interne que dans la logique externe.
Ne pas raisonner outil, mais parler besoin. Après on traduira en outil.
C’est clairement une démarche de conduite de changement. Cela me permet de faire un clin d’œil à Olivier Margerand, PDG de Digital Collab, qui m’a toujours répété que ce que les gens détestent n’est pas le changement, mais la façon dont on essaye de les faire changer : généralement en les forçant à utiliser un nouvel outil (car on pense outils avant de penser usages).
Elle insiste également sur le caractère réel du web, souvent considéré comme une chose virtuelle donc inexistante, alors qu’il est immatériel. La meilleure preuve de sa réalité sont les conséquences que peuvent avoir des propos mal maîtrisés sur la toile.
On arrive à un modèle où la mairie ancrée dans le monde physique a équivalent dans le monde immatériel : le site web de la collectivité.
Bref, un site web n’est pas un « déversoir », on doit créer des architectures, faire un vrai travail éditorial sur les contenus proposés.
Le recul d’une pensée globale permet d’accomplir les petites choses correctement, avec une vision d’ensemble et un résultat final complètement cohérent.
Xavier Crouan partage cette vision et nous parle d’environnement numérique et pas seulement d’un site web, ce que je souhaite également montrer dans mon article « La communication en ligne : vers un écosystème ».
Cela ne veut pas dire que le site web n’a plus d’utilité : il reste la principale source d’information « statique » sur la collectivité. Ce n’est pas parce que le temps est à la rapidité informationnelle qu’il faut faire disparaître les informations stables. Celles-ci constituent un socle de connaissances utiles indispensables à lesquelles peut se référer un usager à tout moment.
De plus, la recrudescence de services en ligne proposés sur les sites web des collectivités les rendent d’autant plus légitimes. Les sites web des collectivités ont donc encore de longues heures devant eux. Ce ne sont pas eux qu’il faut remettre en cause mais la manière dont sont organisées les actualités. Il est nécessaire de réfléchir à une meilleure présentation de l’information, qui prendrait davantage en compte les intérêts réels des usagers et moins ceux des élus. Enfin, l’essentiel est d’avoir un lieu identifié et identifiable : une véritable mairie immatérielle.